C'est quoi la différence ? C'est se sentir décalé des autres ou c'est ce qu'on nous renvoi dans nos particularités ? Rien que le mot est violent. "Celui qui diffère". Et pourtant. Ne sommes nous pas tous "à la recherche" d'une forme de marginalité ? Dans la grande autoroute du commun, finalement se trouver a coté n'est ce pas ce qui fait que l'on se croit vivant car "a part" ? Alors oui, ca peut craindre a un moment, car on va chercher ses semblables et on est toujours proche du communautarisme lorsqu'on porte la différence. Dans "Bunker", Camille Poulie s'en tape. Elle n'est pas ici dans une revendication spécifique, elle est dans le rapport aux autres. Dans ce que nos comportements induisent lorsque l'on exprime qui l'on est. Jessica se démène dans une faune indéfinie. Jeune. Garçon manqué. Grande gueule. Affirmée. Elle défrise. Les gens qu'elles croisent et qui s'inventent des histoires sur elles. Ceux qu'elle côtoie et qui malgré tout sont bien content d'avoir son attention. Parce qu'elle est "autre", "pas comme nous", "insaisissable".

De son trait obtus, cassant, Camille Poulie nous dresse un tableau de l'exclusion. De la marginalité (pour les autres) qui pousse au repli sur soi et au déni. Avec brio, elle introduit la lecture et l'onirisme qu'il faut savoir y trouver lorsqu'on nous rabâche que nos disparités sont à peine tolérées. Alors forcément Jessica n'est pas une tendre. Car le rejet ne peut entrainer que la violence. Car lorsqu'on est acculé il faut se défendre et mordre. Nous aussi on s'en tape. De savoir qui préfère quoi. La différence ne peut être ni une voie royale, ni un fardeau à porter. Elle n'est finalement pas définissable. La seule chose qui compte c'est l'acceptation. De nos ressentis et de ce que l'on souhaite en faire. Il y a trop de "trop" dans nos vocabulaires. Préférons le "tellement", car une vie n'est pas suffisante pour tout apprécier. Cultivons le goût des autres.