Surpopulation. Y a-t-il un autre sujet plus susceptible de provoquer un silence inconfortable lors d'un dîner ? Peut-être l'un des derniers tabous même de notre époque, un nom est intimement lié à ce sujet: Thomas Robert Malthus, auteur du très décrié "Essai sur le principe de la population". Publié à l'origine en 1798, le voici désormais adapté en manga dans la collection Kurosavoir avec quelques éléments pour replacer ce travail dans son contexte et discuter de sa pertinence aujourd'hui. Nous nous appuyons sur trois personnages, un cuisinier qui essaye de combattre le manque de nourriture en créant de nouveaux plats, une infirmière qui se sert du progrès pour sauver des vies, et un économiste qui prévoit une crhise humanitaire provoquée par la famine. En bref, Malthus a fait valoir que la croissance de la population humaine est naturellement encline à dépasser notre capacité à produire suffisamment de nourriture. Les conséquences inévitables seront la misère, de famines et de mortalité accrue, en particulier parmi les classes les plus pauvres de la société. Ses idées ont provoqué un tollé lors de leur publication en 1798 et sont restées extrêmement influentes depuis, affectant des sommités telles que Charles Darwin et des auteurs modernes tels que Paul Ehrlich. Malthus a fait valoir que les contrôles de population se présentaient sous la forme soit de contrôles "positifs" (famine, infanticide, guerre, etc.) soit de contrôles "préventifs" (retenue morale sous forme de report du mariage et de retard d'avoir des enfants). Une grande partie de son travail consiste à convaincre le lecteur de la nécessité de faire preuve de retenue morale comme option la plus humaine pour maîtriser la croissance démographique (rappelez-vous, c'était une époque où la contraception existait à peine et le mariage était généralement le précurseur nécessaire pour avoir beaucoup d'enfants).

Une partie de ce qui a fait bouillir Malthus était son opposition aux lois anglaises sur les pauvres qui étaient opérationnelles à l'époque. Il s'agissait d'un système de prestations sociales pour les pauvres ayant une famille nombreuse. Il a fait valoir que cela ne faisait qu'exacerber le problème de la surpopulation. Après tout, pourquoi prendre la peine d’envisager soigneusement d’avoir ou non des enfants et si vous pouvez les soutenir ? Pourquoi même rester dans un mariage qui ne vous satisfait plus alors que l'État fournira des allocations lorsque vous abandonnerez votre femme et vos enfants ? Bien sûr, ses vues allaient aussi à l'encontre de la doctrine chrétienne d'aller de l'avant et de peupler la Terre - ironique, étant donné que Malthus faisait lui-même partie du clergé de l'Église d'Angleterre. Plutôt que de compter sur les avantages, il appartenait aux pauvres d’améliorer leurs moyens de subsistance. Ceux qui ne voulaient pas subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille n’avaient pas le droit de demander des prestations, qu’elles soient monétaires ou autres, et Malthus a fermement plaidé en faveur de l’abolition des lois sur les pauvres. Beaucoup d'encre a été répandue au cours des deux siècles suivants pour signaler certaines de ses erreurs. Il a complètement mal compris certains faits, et son extension de l'essai avec un corps de documents à l'appui après la publication court le risque de sélectionner des données. Il semble qu'il a ignoré certaines conclusions incompatibles avec ses affirmations. Et, bien sûr, il n'a pas, et ne pouvait pas prévoir, comment les développements technologiques et scientifiques ont amélioré à la fois nos rendements agricoles (par exemple la révolution verte), ainsi que notre santé globale (par exemple les vaccins). Il est important de replacer ce travail dans le contexte de son époque. Et c'est là que l'introduction et les essais sont inestimables, fournissant un contexte indispensable, expliquant l'état du monde à l'époque, ainsi que les autres acteurs clés et les écrits auxquels Malthus répondait. Un autre domaine où le livre est un produit de son temps est le texte lui-même. Il a été écrit à une époque de colonialisme où les habitants de nombreuses régions du monde étaient considérés comme des «sauvages», et l'Afrique était un continent de «nègres». Les attitudes de cette époque colorent cette œuvre. Et, comme d'habitude, l'écriture peut être assez longue et de style narratif, avec des phrases complexes comportant de nombreuses lignes, pleines de sous-clauses.