Réalisé par Thea Sharrock.
Edith Swan (Olivia Colman) vit comme une femme craignant Dieu dans la ville côtière anglaise de Littlehampton dans les années 1920. Elle vit toujours chez ses parents, Edward Swan (Timothy Spall), un homme aux mœurs strictes, et sa femme Victoria (Gemma Jones). A côté, une jeune Irlandaise du nom de Rose (Jessie Buckley) a récemment emménagé avec sa petite fille. Rose se fait passer pour une veuve de guerre, mais son comportement attire l'attention du voisinage comme un chien coloré. Elle jure, fume, boit, fait la fête au pub et a un compagnon (Malachi Kirby). Edith lui montre un peu comment mieux gérer le ménage, apprécie son caractère ouvert et l'invite à la fête d'anniversaire de son père. Mais là, Rose s'oppose à Edward et à d'autres et provoque un scandale. Le contact entre les deux femmes est rompu. Edith reçoit alors des lettres anonymes contenant de violentes insultes. Edith est traitée de pute et couverte d'insultes obscènes. Elle est choquée, sa mère très affectée et son père indigné. La famille porte plainte auprès de la police et soupçonne Rose. La jeune policière Gladys Moss (Anjana Vasan) interroge les deux femmes. Contrairement à son collègue masculin et à son supérieur, elle doute que Rose soit l'auteure des lettres. Mais Rose est jugée.
Cette histoire dramatique, mais racontée avec un sens de la comédie, de deux voisines dans l'Angleterre des années 1920 est basée sur un cas réel. Dans "Wicked Little Letters", la réalisatrice Thea Sharrock et le scénariste Jonny Sweet nous plongent dans une époque où le patriarcat tient les femmes sous sa coupe. Un mode de vie irréprochable, aux mœurs strictes, à l'ombre d'un chef de famille masculin, définit le rôle social et la réputation d'une femme. Si elle ne respecte pas les règles de conduite, l'opinion publique la croit capable de commettre des délits. C'est ce qui arrive à Rose, une Irlandaise pleine de vie, dans une petite ville pateline de la côte anglaise, où des lettres anonymes de haine font le tour de la ville. La période qui suit la Première Guerre mondiale, marquée par de nombreuses pertes, marque également un changement d'époque. Les anciennes valeurs morales sont mises à mal, les sufragettes descendent dans la rue pour défendre les droits des femmes. Une jeune femme, qui veut suivre les traces de son père, travaille désormais au commissariat. Le personnage du film est inspiré de la vraie Gladys Moss, la première femme officier de police de l'histoire du Sussex. La manière dont cette femme est opprimée par les hommes au commissariat et s'émancipe est l'une des scènes les plus éclairantes du film. Les deux personnages opposés, Edith et Rose, sont remarquablement interprétés par Olivia Colman et Jessie Buckley. Buckley incarne Rose avec un plaisir scénique en tant que personnage volcanique, mais aussi chaleureux. Colman joue Edith comme une personne rigide qui aimerait bien être un peu plus décontractée, voire audacieuse. La manière dont elle se laisse infantiliser et intimider par son père sévère lui pèse sur le moral. Son drame ne s'accorde guère avec le comique gras que le film déploie autour des lettres obscènes qui commencent à intéresser la presse. Entre la tonalité féministe et le cas très particulier au centre, le film ne trouve pas de ligne convaincante. Le rythme s'essouffle, les choses semblent tourner en rond. On se croit souvent dans une farce qui veut répandre la bonne humeur et attiser le suspense, mais il s'y niche aussi une ambiance pesante qui va à l'encontre de cette intention.
VERDICT
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Les lettres anonymes de haine existaient déjà il y a 100 ans et elles pouvaient influencer énormément l'opinion publique, comme le montre ce drame de Thea Sharrock inspiré d'un cas réel. Olivia Colman et Jessie Buckley sont excellentes dans le rôle de deux voisines opposées, l'une stricte sur le plan des mœurs et craignant Dieu, l'autre joyeuse et à la langue plus déliée que ne l'autorise le code de conduite des femmes. Avec un œil qui rit et un œil qui pleure, le drame raconte comment l'une des femmes reçoit d'horribles insultes obscènes par courrier et comment les soupçons se portent sur l'autre. Comme il ne parvient pas vraiment à décider s'il veut paraître possessif ou sérieux, le film perd nettement en tension au fil du temps.