Pays Noir : Bois du Cazier, mémoires d'un charbonnage
Plate-forme : Bande Dessinée
Date de sortie : 12 Octobre 2022
Résumé | Test Complet
Editeur :
Développeur :
Genre :
Bande dessinée
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Non
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Non
Test par

Redaction


8/10

Scénario : Sergio Salma
Dessin : Amelia Navarro

Quand on a découvert les usages possibles du charbon, c’est tout un monde et une économie qui se créer. Sergio Salma et Amelia Navarro nous emmènent en Belgique pour retracer l’Histoire d’une mine et de l’évolution de la société. Car derrière tout ça, il est toujours question d’humains, d’éthique et d’argent. On est surpris du choix scénaristique de la bande dessinée. Car on ne retrace pas seulement le récit d’un site en Belgique. C’est un biopic et cela d’un charbonnage. Il parle en son nom, à l’image d’un être vivant. Un choix ingénieux qui nous incite à avoir un autre point de vue. La mythologie des gueules noires née au XIXe siècle par le biais de la révolution industrielle. On l’oublie souvent, mais la Belgique a été la deuxième puissance économique mondiale après l’Angleterre. Tout cela grâce à ses sols riches en charbon. Le Bois du Cazier nous raconte le récit de cet or noir avec ces conséquences au niveau mondial. Tout commence par la prise de conscience des apports possibles du charbon. « Nous sommes en 1822, mes amis, le monde bouge. Ne comptons plus uniquement sur nos fabriques de textile. Diversifions-nous! Et bien soit! Investissons dans le charbon! » (p. 14). Le paysage change avec la construction du chemin de fer ainsi que des baraquements pour que les ouvriers soient à côté du lieu de travail. « Le Pays de Charleroi qui sera bientôt appelé le « Pays Noir ». La demande augmente dans les foyers, l’âtre cédant la place au poële ou à la cuisinière… ce sont principalement les industries lourdes qui engloutissent des quantités énormes de charbon. La sidérurgie. La verrerie. La révolution industrielle a fait de la Belgique la deuxième puissance après l’Angleterre. Elle a ses nouveaux rois, les rois de l’industrie, mais elle a aussi ses nouveaux esclaves. Ici à Marcinelle, je participe à cette euphorie. Pour moi, on fait des calculs, on a des plans. » (p. 19). On poursuit les exploitations pour gagner plus d’argent et répondre à un besoin grandissant d’énergie. Une distinction sociale se met en place avec les bourgeois et les ouvriers. Les uns s’achètent des manoirs avec des jardins, deviennent des mécènes de la culture… et les autres meurent dans d’atroces souffrances amenant avec eux femmes et enfants. Pour répondre à un besoin grandissant de main d’oeuvre, on va la chercher dans de nombreux pays dont l’Italie avec qui sera fait un traité. Des hommes contre du charbon. Les conditions de travail sont très difficile.

La tragédie en 1956 fait 262 victimes et interroge sur la gestion de ces endroits d’exploitation. Puis la société évolue avec plus de besoin et surtout de nouvelles sources de revenues ailleurs. « La vérité c’est que le monde avait changé. On parle de nouvelles technologies. J’appartiens déjà au passé. 1960 – Nous nous sommes engagés envers le CECA. Les mines de Wallonie ne sont plus assez rentables. Le Bois du Cazier doit cesser toute activité au plus tard en janvier 61. Janvier 61, févier, mars… la direction du charbonnage ignore la décision. Je suis en sursis, on n’ose pas obliger le Cazier à fermer. Mais les effectifs sont réduits : 250 hommes. Ils étaient plus de 700 en ’56. 1963 : Verdict de la procédure judiciaire qui n’en finissait plus : seul le directeur des travaux est condamné et le charbonnage paie une somme modique à chaque partie civile. 1964 : Après bien des tergiversations, la fermeture est imminente. » (p. 40). Les ouvriers perdent progressivement leur emploi jusqu’à la fermeture définitive. « Si le charbon, c’est bel et bien fini, on ne ferme pas pour autant. Ils vont exploiter le méthane, un gaz présent partout dans les galeries, il suffit de capter. Le méthane c’est le vrai nom du grisou, la hantise du mineur de jadis. Ce gaz naturel est destiné au réseau domestique et aux centrales électriques. 1981 : Et puis ça aussi, ça s’est arrêté. « Pays Noir ». On efface ces mots du paysage. Ils ne sont que souvenirs douloureux et mauvaise conscience. Le dernier charbonnage de Wallonie, le Roton, ferme en 1984. Partout, on abat les chevalements on rase les bâtiments, on assainit la région. C’est l’hécatombe. Quant à moi, je suis devenu un lieu interdit, dangereux. J’attire quelques curieux, amateurs de friches industrielles. » (p. 42). Faut-il pour autant tout effacer comme si rien ne s’était passé? Dans ce site, on souhaite garder la mémoire. « Un morceau d’Italie à Marcinelle. Comme pour fixer le souvenir, qu’il ne s’envole pas. Le charbon noir, le marbre blanc… La mémoire des ouvriers est prise en compte. Nous avons un musée de l’Industrie et parfois d’anciens mineurs viennent témoigner. Une histoire qui mérite d’être cultivée pour ne jamais oublié les choix du passé et l’impact sur une société. « 2007. Le musée du verre vient rejoindre le site. Le charbon, le fer, le verre, la trilogie qui fit la gloire du Pays Noir réunie en un seul lieu » (p. 45). La démarche attire des visiteurs du monde entier. La consécration se fait aussi par l’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco et le label du patrimoine européen. Pour clôturer la bande dessinée, on trouve un dossier pédagogique avec des photos et des témoignages. Rien de tel pour ancrer d’autant plus le récit.

VERDICT

-

Une bande dessinée d’une grande utilité. Elle fait de la vulgarisation scientifique, de l’Histoire, de l’économie, évoque la lutte des classes… On oublie que la quête de matière première engendre sur une société au global. Expliquer tout cela peut paraître complexe à travers le regard d’un charbonnage. Il est ainsi juge et parti. Une approche originale, audacieuse et très didactique pour une bande dessinée tout public.

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