Nouvelle recrue dans les ambulances new-yorkaises, l'étudiant en médecine Ollie Cross (Tye Sheridan) affronte les pires nuits de la ville entre clochards ingérables, overdoses, tentatives de meurtre, cadavres en décomposition et violence domestique. La recrue est affectée au vétéran coriace Rutkovsky (Sean Penn) qui travaille dur pour lui faire perdre l'idéalisme de sauveur du monde qui anime le rookie volontaire. Il s'avère en effet rapidement que la lutte pour la vie d'autrui est la plupart du temps infructueuse et qu'elle a un impact sur le psychisme des sauveteurs. De plus, il n'y a pratiquement aucune gratitude dans ce travail. Lorsque Rutkovsky est suspendu de ses fonctions, il est pris dans une spirale descendante. Mais son partenaire n'est plus épargné par le quotidien des ambulanciers et ses rares relations interpersonnelles se dégradent également.

L'intrigue n'est pas forcément nouvelle, mais globalement un peu plus accessible que dans le film « Bringing out the dead » (A tombeau ouvert) avec Nicolas Cage, qui est dans la même veine. Mais ici aussi, les aspects négatifs de ce métier sont mis en lumière de manière assez poignante et on se demande vraiment qui est assez masochiste pour exercer encore cette profession Le film ne raconte pas vraiment une histoire continue (à l'exception de la désillusion des deux ambulanciers), mais se compose de différentes sections et, contrairement aux films de divertissement normaux, ne se dirige pas vers un certain but. C'est donc presque un film à épisodes, construit comme une série TV de type "ER" (Urgences) avec des interventions médicales de l'équipe sur une humanité variée et souvent marginalisée (drogués, alcooliques, séropositifs).  Les points forts restent cependant les performances des acteurs, qui donnent de l'éclat à un produit qui aurait peut-être trouvé sa place plus naturelle en série sur Netflix plutôt qu'en compétition sur la Croisette. Tye Sheridan devient de plus en plus un acteur capable d'interpréter des rôles de caractère et un film avec Sean Penn obtient d'emblée au moins la moyenne. Le film est toutefois un drame sans faille. Il n'y a pas de suspense au sens classique du terme et, avec plus de deux heures, Black Flies (aka Asphalt City) est un peu trop long, car le spectateur sait dès la moitié du film que c'est un travail ingrat pour lequel il ne faut pas attendre de reconnaissance. Le réalisateur Sauvaire capture dans sa plus grande production, et de loin, des images sombres qui ne donnent pas beaucoup d'espoir. En particulier dans les scènes où l'on voit Sheridan seul, il enlève presque complètement les couleurs et souligne ainsi la solitude et l'absence de sens de la vie de son protagoniste.