Charlotte impératrice tome 4 : Soixante ans de solitude
Plate-forme : Bande Dessinée
Date de sortie : 18 Avril 2025
Résumé | Test Complet
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Genre :
Bande dessinée
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Non
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Non
Test par

Redaction


8/10

Scénario : Fabien Nury
Dessin : Matthieu Bonhomme

La ‘couronne’ mexicaine vacille et Maximilien celui qui la personnifie est en grand danger. Et comme souvent lors de leurs revers de fortunes, c’est au mieux l’exile ou au pire le trépas qui attendent les souverains déchus. La famille de Charlotte l’avait pourtant bien mise en garde du grand risque que représentait la prise en main de ce pays d’Amérique du Sud faussement docile. C’est donc pour tenter de sauver son époux que l’impératrice parcours le monde. Mais la tâche s’annonce ardue car la lutte qu’elle mène avec ses démons intérieurs ne font que la desservir. Pour preuves ses vaines tentatives pour amadouer Napoléon III qui s’évertuera à trouver des prétextes pour ne pas l’affronter ou celle tout aussi stérile destinée à  chercher du soutien auprès du Vatican qui la fera presque prendre la direction d’un exorciste. Toutes se soldent par de retentissants échecs et font que Charlotte sombre un peu plus dans la folie et dans ses délires paranoïaques. Ces derniers s’exprimant sous toutes sortes de formes, des plus loufoques aux plus tragiques. Pour en rajouter à son malheur notre impératrice peut compter sur les éminences grises qui la conseillent, la comtesse Zichy et Bombelles son amant, cette vipère témoignera d’ailleurs de ces faiblesses mentales auprès d’un véritable ‘tribunal’ médical. Mais au delà de cet état d’aliénation qu’il devient difficile de dissimuler, autre chose inquiète l’entourage de Charlotte: la possible présence d’une descendance en pleine gestation…

Après trois tomes de montée en tension, ce dernier acte s’ouvre sur un abîme. Maximilien est condamné. Charlotte, elle, s’accroche désespérément à l’espoir. L’histoire bascule alors dans une lente chute, intime, solitaire, irrémédiable. Abandonnée de tous, ignorée par les puissants qu’elle supplie — Napoléon III, Pie IX —, l’impératrice du Mexique entame un long dialogue avec la folie. Fabien Nury mêle brillamment les faits historiques et les zones d’ombre qu’il s’autorise à romancer, donnant à Charlotte une trajectoire tragique, presque shakespearienne. On y retrouve toute sa virtuosité narrative : rythme maîtrisé, dialogues tendus, confrontations dramatiques. Et cette manière subtile de révéler, derrière les ors et les titres, une femme qui perd tout sauf sa dignité. Oui, c’est dur. Oui, c’est sombre. Mais c’est aussi puissamment humain. Matthieu Bonhomme signe ici l’un de ses albums les plus poignants. Finis les fastes mexicains : place à l’Europe grise, aux couloirs d’hôtels sombres, aux pièces closes où la folie s’installe. Chaque case est soignée, expressive, vibrante d’émotion contenue. Le trait est affûté, les expressions saisissantes, les cadrages subtils. Et les couleurs de Delphine Chedru accompagnent à merveille cette lente descente — feutrées, froides, mélancoliques. On sent l’époque, le poids des costumes, l’étouffement des conventions. Sept ans après ses débuts, Charlotte impératrice tire sa révérence. Ce quatrième tome est dur, bouleversant, admirablement construit. Un récit qui assume sa noirceur, qui honore son héroïne jusqu’à la dernière page. On referme l’album avec un pincement au cœur, le sentiment d’avoir assisté à une grande tragédie. Et surtout, à une grande BD.

VERDICT

-

Clap de fin pour cette grande fresque romancée proposée par le duo Nury-Bonhomme et consacrée à cette impératrice mexicaine doué d’un caractère bien trempé et aux fortes attaches belges. Une épopée qui rappelle la place d’importance mais aussi les souffrances et le sacrifice des femmes qui agissent dans l’ombre des dirigeants masculins pour que ces derniers puissent briller.

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