Jagaaan tome 2
Plate-forme : Bande Dessinée
Date de sortie : 10 Avril 2019
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Genre :
Bande dessinée
Multijoueur :
Non
Jouable via Internet :
Non
Test par

Redaction


8/10

Scénario : Muneyuki Kaneshiro 
Dessin : Kensuke Nishida

Jagaaan (Jagaaaaaan) est une série toujours en cours de parution au Japon et qui a connu six tomes à ce jour aux éditions Shogakukan. Shintarô Jagasaki est un policier médiocre travaillant dans un petit poste de quartier. Il passe ses journées à se faire humilier par les voyous et ses collègues du commissariat, il ne montre pas non plus assez d'autorité à sa petite amie avec qui il vit. Pourtant, un sentiment d'oppression l'écrase, il ne sent aucune perspective dans sa vie et il n'a pas la volonté de changer. Mais un jour, après une pluie bizarre de grenouilles, les gens qui l'entourent commencent à se transformer et deviennent d'horribles créatures assoiffées de sang. Les grenouilles ne sont que des parasites prêts à se glisser dans le système nerveux des hommes pour prendre possession de leur subconscient. Si Shintarô est également infecté, le symbiote qui a envahi son corps est toujours à l'état larvaire de têtard, donc incapable d'affecter le cerveau de son hôte. Le garçon découvre bientôt qu'il possède des facultés extraordinaires lui permettant de transformer ses membres en armes à feu redoutables, devenant Jagaaan celui qui est prédestiné à libérer l’humanité de la peste tombée du ciel. Sur le chemin, sa volonté sera conduite par un étrange hibou qui parle, Doku , et il comprendra qu'il n'est pas le seul à avoir développé des super pouvoirs liés au parasite tout en préservant l'usage de la raison.

Ce deuxième volume de Jagaaan confirme les premières impressions : une horreur squelettique et bizarre de grand intérêt, avec une forte composante satirique, qui dans ce numéro est davantage explorée, acquérant une dimension proprement anthropo-sociologique sinon proprement métaphysique. La pluie des "grenouilles folles" qui est tombée sur la ville de Buppa ne génère pas plus "des échecs humains", des créatures mutantes et meurtrières qui consistent essentiellement en la déformation monstrueuse du malaise existentiel des gens, avec lequel les mystérieux amphibiens ont fusionné. Heureusement (peut-être) tout le monde n'a pas perdu la raison : parmi les victimes, il y a des gens tels que le jeune policier de quartier Shin Jagasaki, qui a gardé sa conscience aux côtés du "Jagun", le pouvoir de transformer - principalement son bras droit - en arme à feu. Conseillé par le bizarre hibou Doku, il mène sa lutte secrète contre les Détraqués. Dans les épisodes contenus dans le deuxième volume, Jagasaki grandit comme un personnage, dont la nature d'anti-héros est définie par un mouvement narratif assez bien conçu : sans rien gâcher, après ce qui semble être l'acte d'un véritable héros (un certain sacrifice envers un être cher...), notre héros va prendre conscience, au combat, du véritable "moteur" de ses pouvoirs, et de sa capacité à se transformer, qui évolue encore. Cette révélation jette une ombre sur la vie et la motivation du jeune homme, à commencer par son choix d'être policier (voici la satire - et pas seulement) ; et ce n'est sans doute qu'un premier développement dans le contexte d'une identité partagée et conflictuelle. C'est-à-dire celle de tout citoyen japonais (et pourquoi pas, d'un être humain en général), et ce au-delà de la distorsion monstrueuse, et imaginative, qu'ils subissent dans la fiction du manga.

Après tout, la frontière entre un mutant et un détraqué (entre "bon" et "mauvais") est, comme nous le savons (ou devrions le savoir), plutôt instable. Et ce fait est souligné par deux personnages intéressants : Chiharu Matsuyamachi, un autre mutant raté qui se définit de façon ambiguë comme le rival de notre protagoniste ; et Motomu Robamata appelé "Roba", un Détraqué dont la genèse est décrite avec précision - suggérant un méchant important qui pourrait avoir (comme l'allié/rival Chiharu) un rôle futur récurrent. Roba est un "freeter", c'est-à-dire un jeune homme qui vit d'emplois occasionnels, sans avenir et consciemment affligé par son échec social. Ce fait l'amène à s'isoler, réduisant sa relation avec l'autre sexe à la pratique du voyeur, menée d'une manière aussi dégoûtante qu'élaborée (note : le fan-service n'apparaît pas du tout dans ce numéro). Et pour une existence marquée exclusivement par une amère résignation, laquelle est celle de Roba, quoi de plus dévastateur qu'un espoir déçu ? La possibilité de l'amour, qui à un certain moment semblera émerger, sera pour le malheureux garçon exclusivement l'origine - grenouille mise à part - de son "échec". Le design de Kensuke Nishida (I Am a Hero in Nagasaki ) est réaliste, détaillé et précis en anatomie et particulièrement attentif au design des monstres.

VERDICT

-

Un deuxième tome de Jagaaan qui confirme les très bonnes impressions du précédent. Donnez à cette série une chance sérieuse, si vous ne l'avez pas encore fait. De plus, les planches Kensuke Nishida sont une merveilleuse synthèse entre réalisme et grotesque, un vrai plaisir pour les yeux.

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